Opinion

Souvenirs à oublier

le mardi 10 novembre 2015
Modifié à 0 h 00 min le 10 novembre 2015
Par Mario Pitre

mpitre@gravitemedia.com

En cette journée du 11 novembre, Jour du Souvenir, tous sont invités à commémorer le courage, le dévouement et l'abnégation dont ont fait preuve les soldats canadiens lors des deux Grandes Guerres. Toutefois, pour plusieurs de ceux et celles qui ont vécu ces événements, ces souvenirs sont à oublier.

Aujourd'hui en 2015, il ne reste plus aucun vétéran de la Première Guerre, alors que ceux de la Deuxième Guerre sont de moins en moins nombreux. La plupart sont âgés de plus de 90 ans. Quelques-uns d'entre eux ont pu encore assister aux cérémonies officielles du Souvenir, dimanche dernier au cénotaphe érigé devant le palais de justice de Valleyfield. Plusieurs autres se retrouvent cependant à l'Hôpital des vétérans de Saint-Anne-de-Bellevue, qui accueille des vétérans en provenance de tout le pays.

Je me rends régulièrement à cet établissement pour rendre visite à mon beau-père, qui a défendu le pays lui aussi dès l'âge de 17 ou 18 ans. Les soins qu'on y prodigue sont exemplaires et le personnel affiche tout le professionnalisme dont la population doit s'attendre à l'endroit de ceux qui ont défendu le pays.

Mais, comme pour les nombreux soldats qui ont pris part aux récents conflits au Kosovo ou en Afghanistan, plusieurs de ces vétérans ont souffert du fameux syndrome du choc post-traumatique. Toutefois, ce n'est que depuis quelques années que ce syndrome est dûment reconnu par les autorités militaires.

Aussi, force est de constater que la plupart des soldats ayant vécu l'horreur des deux Grandes Guerres ont été confrontés à des lendemains difficiles, à divers degrés. Certains sont restés dans les forces armées, d'autres ont repris une vie normale au sein de la société et ont élevé une famille. Mon beau-père est de ceux-là; par contre, celui-ci s'est toujours montré avare des souvenirs qu'il a conservés de ces années, peut-être pour mieux vivre son moment présent. Hormis quelques faits qui ont filtré, il n'a jamais fait état de ses souvenirs de guerre, sans doute parce que ceux-ci n'avaient rien de glorieux à ses yeux. La guerre, ce ne sont pas toujours des souvenirs qu'on souhaite ressasser, malgré notre devoir de mémoire. Les siens, comme pour de nombreux vétérans, font partie de son jardin secret.