COVID-19
Sports

Le sport de la résilience pour des clubs de Valleyfield

le vendredi 28 janvier 2022
Modifié à 0 h 00 min le 29 janvier 2022
Par Eric Tremblay

etremblay@gravitemedia.com

Après avoir fait plusieurs pirouettes avec les restrictions et fermetures, Ève Filiatrault voit d’un bon œil la réouverture de sports. (Photo Journal Saint-François - Archives Pierre Langevin)

Le sport a été malmené au cours des deux dernières années. Des athlètes ont dû mettre de côté des projets pour lesquels ils s’entraînaient depuis longtemps. Des clubs ont dû se «réinventer», fameux mot à la mode. Le Saint-François a discuté avec Ève Filiatrault de CampiAgile et Josée Guérin de Jodan arts martiaux qui racontent comment elles vont repartir la roue.

«C’est tout un puzzle à gérer de revenir, explique la co-entraîneuse-chef du club de gymnastique et cheerleading de Valleyfield. De rouler à 50 % ou par groupes de 25, je dois préparer mes directives et communiquer avec mes entraîneurs pour savoir qui sera de retour pour une demi-paye. »

Le club est touché par la pénurie de main-d’œuvre. Quelques entraîneurs ont décroché un autre emploi durant la pandémie, parfois plus payant ou avec un meilleur horaire. Ils coachaient par passion. Mais les obligations et responsabilités peuvent éloigner une passion qui est pratiquement sur pause depuis mars 2020. Par chance, elle voit une relève montante prête à émerger.

Shihan Josée Guérin n’a pas le même enjeu de personnel. Ceux qui entraînent avec elles ont tous des emplois principaux tandis que ses assistants sont des élèves adolescents. Son club a été frappé par une fermeture il y a deux mois. Rouvrir lundi est comme repartir à zéro soutient-elle.

« J’ai restructuré les cours, lance-t-elle. En arts martiaux, le travail d’équipe est important. On n’a pas droit au combat en ce moment; j’ai donc acheté plein d’équipement pour l’autodéfense parce que sinon, frapper dans le vide ce n’est pas évident. »

Lors du premier confinement, elle a contribué à la plateforme Quartier général virtuel mise en ligne par la Ville. Une expérience qui l’a sortie de sa zone de confort, mais qu’elle a appréciée. 


Chez Jodan arts martiaux, Josée Guérin a paré les coups durant la pandémie. Elle dit avoir profité du temps pour devenir une meilleure entrepreneure.  (Photo Journal Saint-François - Archives Pierre Langevin)

À la poursuite d’un rêve

L’urgence sanitaire a placé CampiAgile dans une situation précaire. Le club est allé chercher tout ce qu'il y avait de disponible comme programme d’aide financière. «Notre situation, avec l’église en carton, nous a fait réfléchir. Quand tout était fermé, sauf l’école, on s’est demandé si on pouvait chauffer seulement pour les athlètes sport-étude, qui sont une vingtaine. On a essayé de rouler malgré tout. » La clientèle diminuait, mais les dépenses demeuraient.  
Les murs du gym sont placardés de messages bienveillants et positifs. «Comme organisation, on n’est pas des braillards », assure Ève Filiatrault.

Si les athlètes du volet récréatif sont dans la gratitude, c’est différent pour les gymnastes ou cheerleaders compétitives. «Ils sont ébranlés, dit-elle. Ce sont des groupes qui ont des projets. Je regarde la concentration sportive de cheerleading; ils viennent tous les jours pour faire de la musculation ou du tumbling, mais pas leur sport. Ils sont confrontés. C’est atroce. »

Même chose pour les gymnastes, un sport de régularité digne d’un métronome. Les pauses imposées jouent sur le moral et la motivation. Des athlètes qui sont dans l’autocritique et qui se jugent sévèrement.

«Ils peuvent perdre leurs repères, explique-t-elle. Le courage est aussi attaché avec ce que tu te sens capable d’accomplir. Loin des yeux, loin du cœur. C’est une longue route pour les gens investis. Il faut reprendre les rêves et le niveau. »

Le fait est que des équipes rivales des Sparks sur la scène internationale du cheerleading ont repris l’entraînement. Mais Ève refuse de blâmer les mesures sanitaires plus serrées au Québec, jugeant que le fait de se serrer les coudes allait permettre de mieux s’en sortir.

Au moment où la pandémie a frappé, un élève de Josée Guérin devait prendre part au championnat canadien. Le jeune de 12 ans était bien placé pour se qualifier pour les mondiaux qui étaient planifiés au Château Frontenac. «La situation était parfaite pour lui, confirme l’entraîneur d’arts martiaux. Il avait travaillé très fort. Si bien qu’il ne l’a pas eu facile. C’était un vieux 12 ans; il aura bientôt 14 ans et sa nouvelle catégorie va jusqu’à 17 ans. »  

Heureusement, un plan d’entraînement a été trouvé et l’athlète est toujours motivé.

En novembre, une compétition a eu lieu. Mme Guérin n’a pas amené de nouveaux compétiteurs pour l’occasion. Mais elle a trouvé le rendez-vous bien structuré dans le contexte pandémique et était contente de renouer en personne avec le milieu du karaté.

Quant aux jeunes du volet récréatif, elle constate que la coordination est plus difficile. Ce qui n’est pas vraiment une surprise après une pause de plusieurs mois.  

Les deux entraîneurs jugent que la reprise du sport procure autant d’avantages psychologiques que physiques.

Des changements pour le mieux

Les mesures sanitaires ont imposé des changements. Que ce soit la distanciation sociale, les trajectoires de déplacements ou autres. Ça a amené une prise de conscience et des éléments qui demeureront en place tant chez CampiAgile que chez Jodan arts martiaux à la sortie de la pandémie.

Pendant que leurs fonctions d’entraîneurs étaient ralenties, les deux femmes se sont toutefois investies différemment dans leur entreprise. «J’ai travaillé sur la gestion et je me suis inscrite au programme de mentorat de la SADC du Suroît-Sud, indique Mme Filiatrault. La situation m’amène à être meilleure dans d’autres éléments. »

Josée Guérin a suivi un parcours similaire. «La première pause m’a fait du bien, juge-t-elle. Ça m’a permis de me réinventer. Je vais garder des façons de faire. J’ai aussi une mentore du programme Femmessor. Ça a vraiment cliqué entre nous; ça m’aide comme entrepreneure et ça m’a fait progresser. »