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COVID-19
Les agriculteurs devront se passer de nombreux travailleurs étrangers
le vendredi 24 avril 2020
Modifié à 9 h 34 min le 24 avril 2020
On s'attend à ce que la moitié des travailleurs étrangers ne quittent pas leur pays ce printemps. Ce qui aura des conséquences lourdes pour les producteurs locaux qui devront trouver une solution pour remplacer cette main-d'oeuvre inestimable.
«Je vis d'espoir, informe Josianne Brault-Lussier, gestionnaire chez Pomi situé à Franklin. Je sais très bien que la moitié des travailleurs ne devraient pas venir, ce qui représente 15 employés de moins pour nous. »
Elle a expliqué qu'il y aurait beaucoup de «no show» en 2020. Le Honduras ne permet pas à ses travailleurs de traverser la frontière. Le Mexique et le Guatemala sont arrivés avec des ententes avec le Canada. Mais plusieurs craignent la COVID-19 et préfèrent ne pas faire le trajet.
Le premier ministre a lancé un appel aux étudiants pour faire des travaux dans les champs. Mme Brault-Lussier ne veut pas «cracher» sur une main-d'oeuvre locale comme elle le dit. Mais elle prévient que l'agriculture est un art. «Quand j'ai entendu ça, je me suis demandé s'il manquait de médecins, si on appellerait Pierre, Jean ou Jacques pour donner des soins, lance-t-elle. C'est un art l'agriculture. Ça prend du monde avec de l'expérience ou un minimum intéressé par l'agriculture. Dans les pommiers, faut savoir comment placer l'échelle contre un arbre, comment disposer des pommes. »
Pomi emploie les mêmes employés guatémaltèques depuis longtemps. Certains sont là depuis 10 ans. Ce qui fait le succès de la récolte. La gestionnaire souligne le très bon travail de Ferme Québec qui a réussi à faire débloquer la situation pour l'accueil de travailleurs étrangers en temps de pandémie.
[caption id="attachment_81005" align="alignright" width="444"] Pomi à Franklin dispose de trois maisons à Franklin pour héberger ses travailleurs qui viennent du Guatemala.[/caption]
Confinement obligatoire
Le verger de Franklin avait déjà accueilli trois travailleurs avant que le Québec soit mis en pause. Un autre est arrivé la semaine dernière. «Il a dû arriver 24 heures à l'avance à l'aéroport où un médecin l'a évalué, explique Mme Brault-Lussier. Après, il a dû porter un masque et son état était encore évalué toutes les deux heures. Il a été 36 heures sans manger parce qu'il devait garder son masque.»
Depuis, il vit en confinement dans une des trois maisons que Pomi met à la disposition de ses travailleurs. L'entreprise doit le supporter financièrement en plus de continuer de s'assurer que sa santé ne se détériore pas. Le travailleur doit évaluer ses symptômes et l'entreprise doit communiquer les résultats. Un registre de la salubrité est aussi tenu. C'est assez strict, mais la gestionnaire comprend bien la situation.
Au mois de mai, elle attend quatre travailleurs; 8 autres devraient arriver le mois suivant. Elle aura un casse-tête à réaliser pour assurer le confinement sans contaminer les travailleurs déjà arrivés. Par chance, elle dispose de plusieurs maisons. Ce qui n'est pas le cas de tous les producteurs. Ceux-ci doivent se tourner vers un hôtel. Ce qui engendre des coûts supplémentaires.
Le travail manuel d'abord
Aux dires de Josianne Brault-Lussier, Pomi s'en sauve «pas trop pire» pour le moment. Les travailleurs arrivés avant la crise ont plus d'heures. «Ils font du 7 h à 19 h au lieu du 8 h à 17 h, avoue-t-elle. L'horaire du samedi est aussi au complet au lieu d'une demi-journée. »
Si l'entreprise ne reçoit pas toute la main-d'oeuvre attendue, elle devra procéder à certaines opérations de façon mécanique. Notamment en ce qui concerne l'éclaircissement des pommiers. «C'est une opération qu'on doit faire parce que les arbres produisent trop et font donc des petites pommes, explique la gestionnaire. On préfère le faire manuellement parce que c'est plus précis. Mais si on n'a pas nos employés, on doit utiliser un produit chimique [non nocif et approuvé par les instances] et c'est très cher. »
Si les coûts de production sont plus chers, les coûts de consommation pourraient aussi être revus à la hausse. Le Laboratoire en science analytique agroalimentaire de l’Université Dalhousie et l’Institut alimentaire Arrell de l’Université de Guelph avaient déjà prévu une augmentation entre 2 et 4 % avant la crise.