culture

Campivallensiens ou Salaberriens ?

le lundi 17 février 2020
Modifié à 15 h 39 min le 20 février 2020
Par Mario Pitre

mpitre@gravitemedia.com

Le terme Campivallensien servant à nommer les citoyens de Salaberry-de-Valleyfield devrait plutôt être remplacé par celui de Salaberrien, estime une association de défense de la langue française. Dans un courriel envoyé aux médias, l’Association pour le soutien et l'usage de la langue française (ASULF) prétend que l’emploi officiel du gentilé campivallensien est erroné. Son raisonnement est à l’effet que : « un Campivallensien est un habitant de la ville de Campivallensis (Valleyfield). Or, il n’existe pas de ville ainsi dénommée légalement au Québec. Donc, aucun habitant chez nous ne peut être appelé Campivallensien. » Le porte-parole de l’ASULF, Robert Auclair, y va par la suite d’un rappel historique qui correspond à ce qu’il avance. Il rappelle la fondation de la ville en 1874, disant que le maire d’alors, Marc-Charles Depocas, suggère l’appellation Salaberry en hommage au colonel Charles-Michel d’Irumberry de Salaberry, vainqueur de la bataille de la Châteauguay. «Toutefois, dit-il, l’élément Valleyfield, emprunté à The Valleyfield Paper Mills, une papeterie originaire d’Écosse établie ici en 1854, est ajouté plus tard à la suite de l’insistance des descendants des Loyalistes qui préfèrent une appellation anglaise, ce qui donne légalement Salaberry-de-Valleyfleld. Questionné à ce sujet, le chercheur en histoire et archiviste Donald Tremblay, précise néanmoins que le terme Valleyfield était inscrit dès l’incorporation de la ville en 1874 et non pas plus tard. « Dès 1865, le terme Valleyfield était déjà utilisé chez les Anglophones pour désigner le secteur…» Plus tard, à l’usage, le terme Valleyfield s’est imposé, notamment avec l’apparition du journal Le Progrès de Valleyfield en 1878. Le porte-parole de l’ASULF, Robert Auclair, parle de l’expression Campivallensien de façon plutôt condescendante. « Traduit de façon douteuse selon certains, le nom Valleyfield devient « campivallensis », soit campi (champ) et vallensis (petite vallée)… un nom étrange et maladroit issu d'un latinisme douteux, lui-même tiré du nom ajouté Valleyfield plutôt que du nom de souche Salaberry, devenu le toponyme officiel Salaberry-de-Valleyfield. » Par contre, la Commission de toponymie du Québec est d’avis que : « Si l'on scrute le chapitre consacré à la Commission de toponymie dans la Charte de la langue française (articles 122 à 128), il ressort que les noms des habitants ne relèvent pas, au sens strict, de sa juridiction en matière toponymique… le législateur ne fait aucune mention de la dénomination des Québécois par rapport aux lieux où ils résident… les devoirs et les pouvoirs essentiels de la Commission s'exercent sur les noms de lieux et sur la terminologie géographique. Or le gentilé ne saurait prétendre au statut de toponyme — même s'il est formé à partir d'un nom de lieu — pas plus qu'à celui de terme géographique, à proprement parler. » « On pourra, dans des cas exceptionnels, recourir à la dérivation latine; le phénomène consiste à adjoindre un suffixe français au nom de lieu préalablement transposé en latin. » À cet égard, on cite les gentilés Campivallensiens ou encore Pétrifontains (Pierrefonds). Néanmoins, l’ASULF interpelle le conseil municipal actuel, de même que la Commission de toponymie du Québec pour corriger cette « erreur collective du passé » et de le remplacer par celui de « Salaberrien ». N.D.L.R.: À la suite de la publication de cet article, le secrétaire général de l'ASULF, Gaston Bernier, nous a écrit pour préciser que « L’Asulf ne propose pas qu’on remplace illico et dare-dare «campivalensien». Les membres de l’Asulf, ceux du conseil d’administration pour le moment, souhaitent que le gentilé découlant du nom souche «Salaberry» soit placé en première place dans la liste des huit gentilés possibles. La même demande sera acheminée à la Commission de toponymie. On n’impose pas un gentilé. On peut cependant en favoriser un et en recommander l’usage. La logique et le bon sens doivent prévaloir. »

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