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À un cheveu de la retraite

le mercredi 01 juillet 2020
Modifié à 14 h 39 min le 30 juin 2020
Par Eric Tremblay

etremblay@gravitemedia.com

Yvon Asselin accroche sa pioche. Après 58 ans à couper les cheveux et raser les barbes, il se taille vers la retraite.   Son salon de barbier situé au cœur de Huntingdon se veut très chaleureux. Les vieilles chaises, les photos sportives en noir et blanc sur un mur et les avis de décès dans le miroir. «Ça me fait de la peine quand je regarde en arrière et que je vois tous ces bons clients, dit le barbier qui fêtera ses 78 ans le 6 juillet. En même temps, j’ai tellement de bons souvenirs que j’en oublie. Les gens me l’ont bien rendu; c’est chaleureux Huntingdon. » Le métier de barbier était désigné pour lui. Après avoir étudié à l’école des métiers commerciaux, il est venu prêter main-forte à M. Rémillard qui cherchait un jeune. M. Asselin envisageait rester 1 an ou 2; il a finalement passé sa vie. Il est rendu à sa quatrième génération; les petits garçons du temps viennent aujourd’hui avec leurs petits-fils. Son salon n’est pas qu’un endroit où les poils tombent. C’est aussi le théâtre de nombreuses confidences.«Quand les gens sont seuls, ils s’ouvrent, explique-t-il. Je suis là pour écouter; avec les années, je suis devenu un confident. » Sinon, ça jase de sport et de temps en temps de politique. «J’ai la ligue du vieux poêle qui vient. Les histoires, une n’attend pas l’autre. Il y a toujours un gars comme ça au village.  Il n’y a pas de tabous, assure-t-il. Surtout quand il n’y a pas de femme. » Il se désole de laisser ça derrière lui et espère trouver quelqu’un pour prendre sa relève. Le travail c’est la santé Le père d’Yvon Asselin a rendu l’âme à 64 ans. «Bang, comme ça, dit-il. C’est pour ça que je me tiens occupé. C’est la santé. Tu ne penses jamais que tu vas vivre plus vieux que ton père. » Mais la COVID, et la pause imposée de 10 semaines l’ont fait réfléchir. Il a songé ne plus revenir du tout, mais en pensant à ses clients, il s’est dit qu’il ne pouvait pas leur faire ça. Mais le 31 octobre est marqué au calendrier. Il s’agira de sa dernière journée de travail. C’est sûr que ses amis et l’ambiance vont lui manquer : «Mais vient un temps où il faut arrêter. » La mode des cheveux longs, inspirés des Beatles, fait désormais place à des coupes plus sophistiquées. Les barbes sont redevenues populaires. «Ce n’est pas difficile, mais il faut les entretenir ses cheveux et sa barbe, souligne-t-il. Le secret, c’est de les laver; moi les produits, j’ai bien de la misère à croire à ça. » Vers 7 h, il se rend toujours à son salon. Ses clients, ses amis doit-on dire, viennent d’aussi loin que Pointe-des-Cascades. Ils en sont bientôt à une dernière coupe, un dernier potin dans le salon à Yvon. Si les poils tombent, les amitiés restent.