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L'itinérance: un phénomène à comprendre

le mardi 19 octobre 2021
Modifié à 11 h 04 min le 19 octobre 2021
Par Eric Tremblay

etremblay@gravitemedia.com

Pour une deuxième année de suite, la Nuit des sans abri n’a pu avoir lieu à Valleyfield. Ce qui est bien dommage aux yeux des intervenants puisque la vigile nocturne est plus que jamais essentielle pour comprendre la réalité grandissante de l’itinérance dans la région. (Photo: Journal Saint-François - Archives Pierre Langevin)

Depuis le début de la pandémie, l’itinérance est davantage visible. Que ce soit dans un parc, dans la rue ou les services mis en place. Pour les intervenants, ce n’est plus le temps de fermer les yeux sur cette réalité. Mais de tendre les bras et d’aider.

Au cours de la dernière année, l’AbriBus installé au Marché public a chaleureusement accueilli 74 personnes. Un refuge d’urgence ouvert au cours de l’hiver a quant à lui été utilisé par 270 personnes différentes. «Du groupe, 20 % des utilisateurs sont des femmes, a expliqué Marilou Carrier, directrice adjointe à la Maison d’Hébergement et Dépannage de Valleyfield (MHDV). Après seulement huit mois, il y a eu 1370 couchers et 2476 repas ont été servis. Le service répond à un besoin. »

 


Pour Louis-Philippe Boucher, organisateur communautaire au Centre intégré de santé et services sociaux de la Montérégie-Ouest, il est temps d’arrêter la chasse aux sorcières.

«Je suis tanné d’entendre des gens dire qu’il y a plus d’itinérants parce qu’on offre plus de services, a-t-il lancé. Valleyfield est une ville centre, avec des services.»

Il rappelle l’histoire du sans abri qui s’était installé dans le parc à l’angle des rues Dufferin et Maden. Les services ont reçu des appels pour expulser l’itinérant. D’autres appels ont ensuite été faits pour dénoncer l’expulsion.

 


«Il faut les comprendre [les itinérants], ajoute Claude Théorêt, coordonnateur clinique chez Pacte de rue. Contribuer à la cause. On veut leur donner de la dignité humaine. Pas les traiter comme des animaux et les chasser. »
La pandémie a exacerbé la situation. La fermeture de nombreux endroits publics par la Santé public a ajouté de la précarité à la vie difficile des gens de la rue.

Pour M. Boucher, les itinérants sont des gens :«comme tout le monde, avec une richesse. »

Un visage qui change

L’itinérance se vit 365 jours par année. Mais aussi 365 nuits par année. Une réalité qui a été expliquée alors qu’aurait dû se tenir la 17e Nuit des sans abris à Valleyfield le 15 octobre. Pour la deuxième année de suite, la pandémie force l’annulation de l’événement. Ce qui est bien dommage reconnaît André Couillard, directeur à la MHDV.

«On voit beaucoup de personnes qui ont passé par nos services et qui viennent être solidaires des autres personnes, mentionne-t-il. Parce qu’elles ont vécu ces situations-là et elles en sont sortis. La population peut venir, voir et en parler à la maison de cette réalité. C’est une vigile; on passe la nuit dehors. »

 


Claude Théorêt, coordonnateur clinique chez Pacte de rue partage évidemment son point de vue.  «L’événement est important pour comprendre ce qu’est l’itinérance, affirme-t-il. Ce sont des réalités qui existent depuis des années. Le visage change de plus en plus. Nos travailleurs de rue le voit. »

 

 

Des familles et des jeunes se retrouvent à la rue. Souvent en raison d’un trauma ou d’une incompréhension. Des gens qui n’ont pas le réflexe d’aller vers les services.  

Ils sont ainsi en quête de repères. Ils peuvent se retrouver isolés, sans emploi ni réseau, de façon impromptue. «Ces gens-là n’ont pas toujours été comme ça, sur un banc de parc, a résumé André Couillard, directeur à la MHDV. Ils ont perdu leur identité citoyenne. Ce sont comme des boules de quilles; quand tu tombes dans le dalot, tu ne reviens pas dans l’allée. Les organismes sont là pour eux. »

Sept personnes sur 10 qui visitent sa ressource le font pour la première fois. Des gens victimes de préjugés et d’idées préconçues. 

Les différents intervenants invitent la population à mettre leurs appréhensions de côté et s’informer sur cette réalité pour mieux la comprendre et non pas la repousser.