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Justice

Patrick Bordeleau toujours en attente de sa sentence

le jeudi 12 mars 2020
Modifié à 14 h 05 min le 12 mars 2020
Par Denis Bourbonnais

dbourbonnais@gravitemedia.com

JUSTICE.  Après une journée complète de témoignages et de représentations sur sentence au Palais de justice de Valleyfield, le juge Bertrand St-Arnaud n’a pas été en mesure de rendre une décision en lien avec les chefs d’accusation dont Patrick Bordeleau a reconnu sa culpabilité pour fraude, harcèlement criminel et bris de condition. L’ex-hockeyeur de l’Avalanche du Colorado reste détenu à la prison de Bordeaux où il est incarcéré depuis son arrestation le 18 février dernier. Le juge St-Arnaud a pris la cause en délibéré après avoir entendu les parties concernées et il espère en arriver au prononcé de la sentence vendredi matin. «Ce n’est pas simple. Il y a un écart important (entre les demandes de la Couronne et de la Défense). Mon idée n’est faite. Je dois relire mes notes et réfléchir. Je devrais être capable de donner la sentence vendredi. Sinon, ce sera le 23 ou le 24 mars», a exprimé le juge St-Arnaud, mercredi en fin d’après-midi. La Procureure du Directeur des poursuites criminelles et pénales, Me Mylène Brown, réclame une peine d’emprisonnement ferme de 6 mois à un an et elle s’est opposée à la remise en liberté de Patrick Bordeleau. L’avocat de la Défense, Me Guy Lalonde favorise une alternative à la détention et propose des travaux communautaires qui pourraient se chiffrer à environ 180 heures, compte tenu que le prévenu a déjà plus d’un mois de détention préventive. En début de journée, Patrick Bordeleau a plaidé coupable à deux nouvelles accusations portées contre lui lors de son arrestation, le 18 février, soit des bris de condition en rapport avec le jeu de hasard en ligne et l’omission de communiquer avec la Cour pour faire connaître une nouvelle adresse de résidence. Patrick Bordeleau a notamment reconnu avoir commis une fraude de 63 500 $ représentant la somme qui a été détournée de la carte de crédit de son beau-père, Yanick Leduc. Mercredi matin, ce dernier a livré un témoignage au nom de sa fille, Marie-Preycylla Leduc, trop affectée par les événements survenus depuis novembre 2018. «Nous avons été victimes des actes de ce criminel qui a anéanti toute une famille. Il a fait basculer nos vies en faisant une fraude planifiée et préméditée. Il a pris l’argent afin de satisfaire son appétit pour le gambling, jouant 81 500 $ en 5 jours dans son sous-sol. Ces épisodes ont été une source de stress et d’angoisse pour notre famille. Nous avons été victimes de ses mensonges et de sa manipulation de haut niveau. Il a violenté psychologiquement ma fille, causé un tort énorme à mon bébé de 29 ans. Il a abandonné ses enfants de 4 et 1 an. Il aura un jour à se justifier devant eux. Il n’est rien d’autre qu’un arnaqueur. Il joue encore ses dettes au lieu de les payer», a martelé le beau-père. Profonde dépression Patrick Bordeleau, les menottes aux mains, s’est défendu en signifiant que des problèmes psychologiques l’ont amené à poser ces gestes, qu’il était en dépression grave après avoir tout perdu du jour au lendemain avec la fin de sa carrière dans la Ligue Nationale de hockey. «J’ai été longtemps dans le déni. Je me suis jeté là-dedans (consommation de drogue et jeu). J’étais gelé raide. Des problèmes de santé mentale, ça peut arriver à n’importe qui. J’ai suivi une thérapie à la Maison Jean-Lapointe en mai 2019 et je fais des meetings régulièrement depuis. Quand ça ne va pas bien dans ma tête, je vais me ressourcer. J’ai hâte d’expliquer un jour à mes fils ce qui est arrivé, de leur parler d’une leçon de vie et qu’on peut se relever», a dit le gaillard de Rivière-Beaudette qui aura 34 ans le 23 mars. Affirmant être «en contrôle», Patrick Bordeleau estime qu’il n’est plus la même personne qui a atteint le fond du baril à l’été de 2018. De plus, il a mentionné que son beau-père a été remboursé pour la fraude de 63 500 $ par les assurances de la compagnie de carte de crédit. «C’est une vengeance gratuite. Je n’ai jamais fait de harcèlement. J’essaie de comprendre pourquoi une mère et un grand-père veulent m’envoyer en prison, m’empêcher de voir mes enfants, quand ils ne perdent pas un dollar. M. Leduc n’a pas perdu d’argent, peut-être sa dignité. De mon côté, ce n’est pas rose», de poursuivre le hockeyeur qui a évolué dans la Ligue Nord-Américaine avec les Pétroliers du Nord avant sa récente arrestation. A propos du harcèlement, le juge St-Arnaud a indiqué à Patrick Bordeleau qu’il avait envoyé 88 textos à son ex-conjointe autour du 15 novembre 2018. Le principal concerné devait souligner qu’il a donné 500 000 $ pour payer sa maison à Coteau-du-Lac et qu’il a tout perdu. La Procureure de la Couronne, Me Mylène Brown a avancé que Bordeleau a contracté des dettes estimées à 250 000 $ et qui demeurent impayées. Quant au montant de 63 500 $ défrayé par les assurances de la carte de crédit, Me Brown maintient que tous paient collectivement cette fraude. «Il joue avec l’argent des autres. Le montant ne s’efface pas et ne tombe pas du ciel», a lancé la Procureure. Me Brown s’appuie sur la jurisprudence pour demander au juge d’imposer la détention ferme. Me Guy Lalonde a parlé d’exagération de la part du beau-père, Yanick Leduc, qui exige par acte notarié un taux d’intérêt de 60% pour une 2e hypothèque sur la maison vendue au début de l’année. «Mon client devra payer 39 000 $ par année en intérêts. C’est un non-sens.» A cet effet, M. Leduc devait préciser qu'il a fait des prêts totalisant 71 500 $ à son gendre pour lui permettre de régler ses dettes de jeu et qu'il n'a toujours pas été remboursé. Me Lalonde avance que la sentence doit refléter la situation. «Nous sommes des humains, pas des machines. M. Bordeleau a avoué ses choses, il s’est excusé de bon cœur. Il a des enfants et il a commencé une nouvelle vie avec sa conjointe actuelle. Il ne faut pas donner de la prison pour se venger. Au cours de cette longue journée, nous avons passé 80% du temps à parler de d’autres choses que les accusations. Mon client a vécu la détention, il a fait plus d’un mois. Il est admissible aux travaux communautaires et c’est ce que je vous demande, M. le juge», a recommandé Me Lalonde.