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L’éventuelle légalisation du cannabis suscite des pour et des contre

le jeudi 13 avril 2017
Modifié à 0 h 00 min le 13 avril 2017
Par Steve Sauvé

ssauve@gravitemedia.com

Le dépôt du projet de loi du gouvernement Trudeau visant à établir les nouvelles sanctions relativement à la possession de cannabis représente une bonne nouvelle pour les consommateurs mais suscite des inquiétudes palpables dans la communauté.

Le gouvernement fédéral va décriminaliser le cannabis. Dans la population, il y a deux discours sur le sujet. Le premier des consommateurs qui insiste sur le fait que la consommation de cannabis est répandue et que cela aurait dû être fait depuis longtemps. De l’autre, certains spécialistes en santé qui se questionnent sur les répercussions à court et moyen terme et des intervenants sociaux qui espèrent des campagnes de sensibilisation.

Une étude de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) révèle que la consommation de cette drogue chez les personnes de 15 ans et plus a augmenté et se situe désormais à 15 % de la population. Une autre étude de l’ISQ confirme que les 18 à 24 ans représentent la plus forte proportion de consommateurs occasionnels.

L’organisme communautaire Pacte de rue, qui intervient auprès des jeunes de 12 à 25 ans vivant des situations problématiques, travaille régulièrement avec des consommateurs. Selon Claude Théorêt, directeur de la ressource, le gouvernement doit prendre des mesures concrètes pour sensibiliser la population. «Nous ne sommes pas pour et nous ne sommes pas contre, souligne-t-il. Cependant, l’idéal serait que les profits de la vente servent à faire de la prévention comme c’est le cas en Uruguay.»

M. Théorêt insiste également pour que le gouvernement maintienne le prix du cannabis. «Le légaliser enlèvera de la criminalité, mais si le prix augmente en flèche, ça va encourager le marché noir.»   

Ce qu’en dit un expert

Mohamed Ben Amar, pharmacologue, expert en toxicomanie de l’Université de Montréal, croit qu’un encadrement est essentiel afin que les consommateurs soient informés des possibles conséquences de la consommation de cannabis. «Plus la consommation commence tôt, plus cela représente un danger. Chez les jeunes de 25 ans et moins, le cerveau est plus vulnérable, explique l’expert. Il y a aussi des jeunes qui seront plus à risque de développer de la schizophrénie s’ils ont commencé à consommer du cannabis tôt dans leur vie.»

Selon lui, la décriminalisation du cannabis peut avoir un effet positif sur l’aide que pourrait demander les consommateurs. «Au Portugal, toutes les drogues sont décriminalisées et il n’y a pas plus de consommateurs. Il y a même eu des impacts positifs. Les gens n’ont pas peur de demander de l’aide pour se faire traiter de leur problème de dépendance.»

Et la justice

Le nouveau régime de sanctions lié à la marijuana limitera la possession à 30 grammes. Si pour certains professionnels ce n’est pas une bonne nouvelle, d’autres voient cela comme un avancement. Pour Me Alexandre Dubé, la décriminalisation du cannabis pourrait éviter bien des problèmes aux consommateurs occasionnels.

«La majorité des gens qui passent devant le tribunal en lien avec le cannabis sont accusés de possession simple, dit Me Dubé. Ces personnes se retrouvent avec un casier judiciaire pour moins de deux grammes de cannabis. La nouvelle loi permettra d’éviter cela.»

La juge à la retraite Odette Perron déclarait en novembre 2015 qu’elle était contre la légalisation du cannabis. «Le cannabis, c’est la porte d’entrée pour toutes les autres drogues, disait Mme Perron. Les statistiques démontrent que les deux états américains (Orégon et Colorado) qui ont légalisé le cannabis ont vu leur taux d’accidents causant la mort quintupler depuis la légalisation. Je pense que s’il n’y avait pas de drogue, le système judiciaire n’aurait rien à faire. C’est subjacent à toute la criminalité.»