culture

Jacques Cartier s’est arrêté à Sainte-Catherine, selon un historien

le jeudi 07 juillet 2022
Modifié à 14 h 20 min le 11 juillet 2022
Par Audrey Leduc-Brodeur

aleduc-brodeur@gravitemedia.com

Monument de Jacques Cartier à Montréal. (Photo : Le Reflet – Denis Germain)

L’histoire a-t-elle été dans l’erreur pendant cinq siècles? Un membre de la Société de La Prairie-de-la-Magdeleine remet en doute le passage de Jacques Cartier à Montréal lors de son troisième périple en Amérique, en 1541. Selon Albert Lebeau, l’explorateur aurait plutôt visité ce qu’est aujourd’hui… Sainte-Catherine.

«Tout le monde, moi le premier, pensait que Jacques Cartier s’était arrêté à Montréal, puis était reparti à Québec. Il n’avait pas lieu d’en douter», convient celui qui n’en est pourtant pas à sa première remise en question de l’histoire.  

Des documents, soit une carte préservée dans une collection privée et des récits issus du troisième voyage de Jacques Cartier, brouillent cependant les cartes, selon M. Lebeau. 

Bassin de La Prairie

Dans ces écrits, la traversée infructueuse des rapides de Lachine par Jacques Cartier, qu’il décrit comme un «grand saut» à franchir, est relatée, dit M. Lebeau. Après ses multiples tentatives, il se dirige vers la rive à proximité.

«Une fois à terre sur la rive sud du Saint-Laurent, les Français suivent un grand sentier battu en direction des rapides. Arrivant à destination, ils tombent sur un lieu habité par des Iroquoiens où on leur fait bon accueil», affirme-t-il, rapportant les propos tirés de ces écrits.

Pour l’historien, la rive dont il est question se trouvait alors dans le bassin de La Prairie. Il s’appuie sur une carte réalisée entre 1542 et 1544, dont une copie est disponible dans le bulletin mensuel de février de la Société d’histoire de La Prairie-de-la-Magdeleine.

«Jacques Cartier est le premier à avoir mis le pied à terre sur la Rive-Sud. Jamais on n’aurait pu imaginer une telle chose, mais on a une carte et des écrits pour le prouver. Ce n’est pas une question d’opinion, mais de faits», martèle M. Lebeau.

«Sur la rive sud, nous voyons clairement le grand bassin de La Prairie, où nous croyons que les Français ont jeté l’ancre et même mis le pied à terre autant avant qu’après avoir affronté les rapides», poursuit M. Lebeau.

Si Cartier souhaitait franchir les rapides de Lachine, c’était pour parvenir à sa destination, le lac Ontario, révèle l’historien. Mais de plus «puissants et turbulents» rapides encore l’auraient attendu sur sa route s’il y était arrivé, note-t-il. Une ascension d’environ 37 mètres entre son lieu de débarquement, l’équivalent de Sainte-Catherine aujourd’hui, et Coteau-du-Lac aurait été nécessaire, soutient M. Lebeau.

«Aussitôt, Cartier s’avoue vaincu et renonce à se rendre plus loin, car l’explorateur français sait maintenant avec certitude qu’aucun voilier ne pourrait négocier ce dangereux passage», ajoute-t-il.

Anniversaire

En 2035, cela fera 500 ans que Jacques Cartier a posé le pied dans la région d’Hochelaga, rappelle M. Lebeau. Il souhaite que l’anniversaire de son voyage de 1541 dans la région soit également souligné, vu son importance historique pour le territoire.

Réécrire l’histoire

Lieu de la bataille de La Prairie, trajet du chemin de Chambly, escale de Jacques Cartier; Albert Lebeau les a tous remis en question. L’historien en fait presque désormais une habitude. Pour sa dernière découverte, il est appuyé par Jocelyn Duff, architecte membre de la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville à Montréal.

Dans un échange de courriels partagé au Journal par M. Lebeau, son collègue estime que la version émise dans l’ouvrage Gens du fleuve, gens de l’île de Roland Viau, deux fois primé par le Gouverneur général, selon laquelle Cartier s’est arrêté à Hochelaga-Maisonneuve, «ne fait aucun sens».

Il qualifie l’histoire officielle «d’illogique, puisqu’elle ne coïncide pas avec le texte de Cartier», avance-t-il. À l’approche des 500 ans du premier voyage de l’explorateur, M. Duff dit espérer que plusieurs intervenants du milieu se rallient à la version des deux hommes.

«Sans équivoque, Jacques Cartier aurait été le tout premier, d’une longue liste d’illustres personnages historiques, à passer par le grand carrefour géographique de La Prairie et à y mettre le pied à terre.»

-Albert Lebeau, historien